lundi 12 octobre 2009

Extraits chap. IV


"[...] Ensuite qu'Ashkhabad était la capitale du pays, qui se trouvait en plein coeur de l'Asie centrale, qu'autrefois et pendant trop longtemps à son goût, le Turkménistan avait été une république soviétique... Elle s'étala sur la grande fierté du peuple turkmène d'avoir acquis leur indépendance et me promis que je me plairai beaucoup dans cette ville qu'elle qualifiait d'extraordinaire, de splendide. Puis elle s'enlisa dans l'énumération exagérée d'adjectifs vantant tous les mérites de son pays... En somme une vrai patriote. [...] Brusquement, elle s'arrêta, me fixa comme si elle souhaitait sonder mon âme. Je ne la quittais plus des yeux, bien que tenté de les baisser à cause du trouble que générait en moi son insistance. Puis elle sortit de sa poche un épais jeu de cartes aux dimensions d'un tarot, à la différence que celui-ci n'avait aucun dessin. Recto verso, ces cartons rectangulaires ne représentaient rien, à part des couleurs uniformes. Elle le posa sur sa tablette qu'elle avait rabattue devant elle, et me susurra tout près de l'oreille, que ses cartes lui permettaient de lire l'avenir. [...] Je vis au loin une arche sous laquelle nous allions passer. J'interrogeais le chauffeur, qui m'apprit, avec un certain enthousiasme qu'il s'agissait de l'Arche de la neutralité, le monument le plus emblématique d'Ashkhabad, qui fait la fierté de tous. Sa hauteur est de soixante-quinze mètres et à son sommet, une statue dorée a la particularité de tourner sur elle-même en suivant le parcours du soleil. Pour moi, cette arche ressemblait surtout à une grosse fusée. Mais à travers elle, je sentais l'envie et le désir des autorités de faire la démonstration, à mon goût un temps soit peu ostentatoire, de leur assise économique. [...] Trois hommes déboulèrent au pas de course. J'étais déjà en position d'attaque, le coeur battant la chamade et le visage crispé en découvrant qu'ils étaient armés de barres de fer. Mais très vite, je compris qu'il s'agissait des amis de l'homme que je venais de secourir. Ils nous invitèrent rapidement à les suivre et en moins de deux, j'étais installé à l'arrière d'un 4X4, entre deux parfaits inconnus. Nous roulions à vive allure en faisant crisser les pneus à chaque virage comme si nous avions le diable aux trousses. Et nous quittions la ville, lancés sur une route dont le seul éclairage était celui de nos phares. [...] Toutes nos soirées se terminaient de le même façon : eux, sombraient tous ivres, dans un bruyant sommeil tandis que moi je restais seul, je pensais à Macassambi, à Can, aux événements incroyables que j'avais vécus, à la pierre scintillante sous mes doigts qui pendait sur mon coeur et que personne n'avait vue. [...] Puis après ces sept jours d'harmonie, en compagnie de mes amis Russes, l'ambiance changea radicalement avec l'arrivée, tard dans la nuit d'un cinquième larron, un dénommé : Adrian. [...] Sa peau lisse et pâle ressemblait à de la porcelaine et ses yeux en amande d'un bleu presque translucide d'une clarté éblouissante. Sa bouche était fine et légèrement boudeuse, juste ce qu'il fallait pour en apprécier sa candeur, son nez délicieusement retroussé, sa chevelure longue et soyeuse d'une délicate finesse d'un blond naturellement clair. Elle ressemblait à une poupée parfaitement conçue. Une poupée de collection avec laquelle on ne joue pas, mais qu'on ne se lasse pas d'admirer. [...] Elle était d'une perfection si remarquable, que le mot "beauté" n'était pas suffisant pour la décrire et lui rendre justice. "Merveille", "chef-d'oeuvre", "prodige", étaient cent fois plus adaptés [...] Mais ce qui m'inquiétait au plus haut point, provoquant une turpitude ingérable dans mon esprit, c'était que j'ignorais totalement le déroulement final de cette délivrance et quel était le rôle que je devrai inévitablement jouer. [...] J'avais explosé le plus haut degré de ma vigilance, telles des sonars, mes oreilles tentaient de capter tout son suspect venant de l'étage. Il fallait que je me tienne prêt à toutes éventualités, comme celle de voir Yelena débouler dans le salon en brandissant la pierre vers nous. Mes yeux de lynx ne lâchaient pas les va-et-vient de Tiger, et j'imaginais toutes les possibilités de fuites rapides et sans bévue. Je dessinais mentalement le meilleur parcours à travers le salon... Mon coeur continuait à marteler ma poitrine, dans un rythme frénétique : "bada boum bada boum bada boum..." [...] Je ne disais pas un mot, j'avais la trouille de ma vie ! Une peur tenace que rien, à ce degré, ne pouvait atténuer, "bada boum bada boum bada boum..." Mon coeur allait sûrement me lâcher... Je l'espérais presque, lorsque l'interphone retentit. [...] En apnée, je fixais le regard cruel et glacial de ce dangereux criminel, qui était parfaitement incapable de réagir pacifiquement ce soir-là. Un rien, j'en étais certain, pouvait le faire craquer...un tout petit rien, le souffle d'un détail, un microscopique incident... Et malheureusement, mon appréhension allait se confirmer. "Bada boum bada boum bada boum..." Je devais en être à plus de deux cents pulsations minute, quand il monta, une à une, les marches de l'escalier. Dans un silence de mort, restés au salon, sans nous concerter nous partagions tous la même frayeur : Qu'allait-il se produire [...] "

1 commentaire:

  1. Un chapitre violent, terrifiant et réaliste à la fois,on en perd rien, on espère jamais vivre un tel truc! La pierre prend tout son sens! mais quand même je retiens surtout la violence et l'extrème detresse du héros. Beaucoup aimé! C.A

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